La Principale, un roman de Jean-Marc Robin

Bientôt six mois que je travaille à ses côtés, chacun se méfie de l’autre. La Principale redoute de perdre une parcelle de son pouvoir, et moi, je suis dans l’année de ma titularisation, je ne peux pas me permettre un conflit avec la cheffe d’établissement, même si j’ai compris que son avis ne compterait pas pour la poursuite de ma carrière car cela faisait trop longtemps qu'elle n’avait plus aucun crédit vis-à-vis de l'Inspecteur d'académie. On s’observait, elle me laissait gérer le quotidien et piloter la pédagogie, elle investissait le relationnel et la communication. Quelques minutes de discussion chaque jour ; nous ne formions pas une équipe, c’était pénible. Les professeurs s'étaient habitués à une Direction divisée, ils savaient en jouer. Mon prédécesseur avait pris le parti de se moquer d’elle derrière son dos. La Principale avait peu d’idées, elle déléguait tout ce qui l’ennuyait, y compris des tâches qui relevaient de son autorité comme la présidence de la commission permanente. J’en étais arrivé à une conclusion simple : elle ne servait à rien, elle ne se mettait pas au service de l’établissement, au contraire c'était l'établissement qui était à son service. En dehors de l’aspect pécuniaire, elle existait socialement grâce à lui, et c’était bien ce qui comptait le plus à ses yeux : être appelée « Madame la Principale ».

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